lundi 31 décembre 2007

Paris


Avez-vous perdu quelque chose? Quelque chose de précieux. Vous ne voyez pas. Vous cherchez en jetant au grand vent des éclats de voix, des zébrures de couleurs, des foulards de soie, des je ne sais trop, des je ne sais quand, mais où donc, suis-je passé par ici ou plutôt par là, de quoi me parlez vous, je ne vois pas, le rien est-il caché là, en dessous du fourre tout, au dessus du trop plein? Je crois que dehors il fait froid.


Le matin roule sa couverture de murmures (en blanche douceur).
Toi et moi.

Lyon


Êtes vous solitaire?
Il semble qu’il fasse froid.
Avez-vous peur des extraterrestres?
Les héritiers sont pressés d’ouvrir le testament.
Gagnez vous beaucoup d’argent?
Seuls les spécialistes ont un avis tranché.
Aimez vous chanter?
Le fétichisme adolescent surfe sur la crête des opinions favorables.
Avez-vous rencontré des SDF?
Les mobiles sont légers mais le crime est parfait.
Craignez vous la grippe aviaire?
L’inflation est jugulée à 1,777.
Avez-vous peur de mourir?
Le temps parait long au spectateur qui s’ennuie.
Avez-vous du flair?
L’enquête vise un électorat fatigué d’avoir trop parlé pour ne rien dire.
Nous vous remercions d’avoir répondu avec franchise et simplicité à notre enquête.


Je préfère appeler un chat un chat et ne pas bifurquer à la première difficulté rencontrée sur le chemin de la perfection. La perfection du son. Je le précise le son vert. Vert comme un fruit, comme l’aurore boréale ou le citron alphabétique qui permet de bouder son plaisir pour l’aiguiser sur le tranchant du fil d’une histoire à ne pas couper en rondelles chaque soir de peur que l’épisode suivant ne s’érode et que les oreilles enfantines ne se lassent. La nuit les pommes clignotent délicieusement sous le murmure un peu chaloupé des chouettes cachées. Je vous invite à les écouter avant de vous coucher contre moi, tout contre moi, au revers de la nuit noire.

Arles






Faites moi croire que vous avez besoin de moi. Sachez quand même que je ne vous croirai pas.
Les pieds de nez et les crocs en jambe ont une certaine indépendance parfois arrogance. Ils ne demandent pas leur reste tant ils sont prestes. Ils vont droit devant, prêt à bifurquer, prêt à s’arrêter, prêt à soulever des feuilles d’ombre et à agiter des claquettes de lumière.
Mais il suffit, sur la pointe des pieds, que quelqu’un griffe le carreau de la fenêtre au lieu de frapper à la porte pour que la surprise soit au rendez-vous.

Lyon


Je me suis promenée longtemps, longtemps
et je ne sais pourquoi,
je me suis endormie, tout en marchant,
en continuant de marcher, sans raison, sans plan, sans idée préconçue, au hasard,
en laissant se faire un changement irréversible,
en apesanteur, en légèreté, sans froisser un souffle d’air, sans anticiper un but, une action
rien qu’en déambulant dans le vide, le vide, juste dans le mouvement permanent, à peine perceptible, lent et continu, le rythme qui accouche la fluidité insaisissable, l’immersion permanente, l’immense pulsation de milliards d’infinis.

Gardone Riviera

Porrentruy

Cremona

La Tourette





Rossemaison




Fais le tour des alentours, attention aux dérapages, sans lampe de poche mais le nez en l’air, entre lune cachée et lune rousse, méfies toi des longues oreilles, avec prudence avance un pied puis l’autre, un mot devant et un autre derrière, n’oublie pas, un premier frisson, un deuxième murmure, saisis l’ondulation de tes émotions, attention, attention, déjà la nuit a plongé sur toi, te serre dans les doux chuchotements, approche toi, approche toi.

Je te donne rendez vous là où,le soir venu, le bleu fait une bourrasque de tonnerre et illumine le jappement du chien, le crissement des pas éclipsés du jardin, le sifflement soyeux des mains plongés dans les poches qui se saisissent de la clé pour ouvrir la porte.
Là entre pénombre et lune espiègle, nuages chapardés, s’immobilisera brusquement le temps,
tu épieras le moindre signe, tu allongeras les oreilles au clapotis des voix, à la nuée des enfants qui viendront frôler le présent.

Dans la nuit tu reconnaîtras la maison, comme un coquillage jailli du sable de ta mémoire, tu l’entendras chanter à ton cœur.

Maison de ton enfance, habitée de musique, de parfums, de voix, de rires, parsemée de pétales fauves et de perles d’ange, de douceurs furtives, aux édredons blancs de plumes de soleil, aux pétales d’eau, enneigée de rêves fruités, de saveurs cueillies aux corbeilles des saisons, d’arômes dispersés aux langueurs de la nuit.
Maison de jour, maison de nuit, jappement des volets ouverts, miaulement des volets fermés, et toi, enfant, mauve danseur des nuages, acrobate des ciels étoilés, magicien bleu de peur, rose de bonheur, grimpe sur les genoux de l’abîme, caresse les joues abricots du passé, la blancheur écaille les vagues que suit la mémoire qui court, il était une fois…, sur le souffle d’une histoire.